
Aujourd’hui, je me sens d’humeur à faire des confidences. Et j’ai envie de te dévoiler un peu l’envers du décor de ce blog.
Toi, bien sûr, tu lis l’un de mes articles et tu ne vois que l’élégance, la magie, le glamour… C’est normal. Mais sache que pour te permettre de vivre cette expérience de lecture fluide et agréable, beaucoup de travail est nécessaire en amont.
Prenons l’exemple de cette robe, par exemple.

Pour produire un article à succès, il faut d’abord partir du matériau, c’est-à-dire la réalisation cousue. A mes débuts, je restais très artisanale : je faisais tout moi-même, imagine ! Je reprenais le patron, je coupais le tissu, j’assemblais les pièces. Ça me prenait un temps !!
Par la suite, j’ai monté un atelier dans mon garage pour gagner du temps. Mon équipe est au top ! Super motivés, gros volume de travail, l’esprit très corporate… une belle maturité pour des enfants de douze ans qui ne parlent même pas la langue.
Evidemment, c’est moi qui ai la plus lourde charge mentale, puisque je dois choisir l’association du patron et du tissu. En l’occurrence, un modèle Burda de juillet 2015 (patron numéro #110) – matché avec un coupon de coton imprimé des Coupons de St-Pierre.
La plupart du temps, je fais confiance à mon équipe de stylistes pour créer les combinaisons. Mais je suis restée très simple, et j’aime encore mettre les mains dans le cambouis moi-même ! Ce patron, c’est moi qui l’ai choisi. Cette robe longue, j’en rêvais depuis la sortie du magazine en 2015 mais elle demande un certain volume de tissu, ce qui m’avait toujours poussé à laisser ce projet de côté. Jusqu’à ce que je tombe amoureuse de ce coton, un métrage de 3m à motif de roses, déniché incidemment dans la boutique des Coupons de St-Pierre alors que j’allais y retirer une commande en ligne. Parfois, c’est important de ne pas laisser les coursiers faire le boulot. Il faut rester connecté au terrain… Créer les conditions de l’étincelle créative.
L’étape suivante, c’est le moment où j’indique les variations à mes ouvriers. Très peu sur ce patron parfaitement taillé, cousu à la taille 36 : j’ai seulement remplacé les deux volants de la jupe par un seul, allongé – pour faire tenir toutes les pièces dans mes 3m et donner un peu moins de flon-flon à la jupe, tout en gardant ce côté « midi » qui me plaisait dans le modèle original. J’ai aussi renoncé à la ceinture plissée proposée à part, car elle est coupée dans le biais et gourmande en tissu.
Eh oui, diriger un business, c’est aussi savoir prendre des décisions.
… Si, j’ai failli oublier ! Il y a une modification significative, c’est que ma version a des poches. Prises dans les coutures : en temps normal, ce sont les poches les plus simples à créer. Mais quand on sait que la robe ferme par un zip invisible sur le côté : ajouter les poches aux côtés devient un challenge technique comme je les aime ! Pour cette phase, je fais appel à mes ingénieurs – mes petits « trouveurs de solution », comme je les appelle 😉 En l’occurrence, faute de tuto existant sur internet, ils ont sacrément phosphoré pour parvenir à une technique de montage rendant les poches compatibles avec la fermeture éclair. Si cela te tente, je leur demanderai peut-être de t’en faire un petit tuto au prochain article.
Choix des boutons, des détails… les accessoiristes interviennent plutôt vers la fin du process, mais je tiens toujours à garder le dernier mot. Sur cette robe, j’ai choisi moi-même, dans mon considérable stock, les boutons demi-boule vintage qui viennent orner le devant. Un petit secret de fabrication au passage ? Ils sont purement décoratifs, la robe étant zippée. Chut 😉
Ensuite, une fois la robe créée, vient la préparation de l’article à proprement parler. Pour le rédactionnel, je mets assez vite mon pool d’auteurs au boulot. Je donne l’angle (exemple : « je veux un article décalé autour de James Bond« , ou encore « cette semaine on va bosser sur le thème de la maternité indigne« ). Les auteurs préparent plusieurs drafts d’articles parmi lesquels je choisis celui dont la ligne colle le mieux au projet. Je reprends évidemment deux ou trois points moi-même, pour les personnaliser.
(Hello ! c’est moi-même qui ai écrit la phrase que tu es en train de lire !!).

Puis vient le moment de la séance photo. Là, tu ne le vois pas, mais c’est une véritable petite fourmilière qui s’active autour de moi ! Mise en beauté, coiffure, direction artistique… C’est toujours un moment très busy. Je donne des consignes strictes pour être la plus naturelle possible : c’est important pour moi de ne pas être parfaitement maquillée, ou d’avoir les cheveux parfois un peu en biais. Je veux rester connectée avec la vraie vie, je veux que mon lectorat puisse continuer à s’identifier à mes rides de future quadragénaire, ou à mes cernes de jeune maman. Cela m’oblige forcément à juguler un peu mon éclat naturel et ma prestance innée, mais je ne recule devant rien pour que tu te sentes proche de moi, lecteur·rice complexé·e par ton âge, ta peau imparfaite ou tes bourrelets.
Le directeur artistique prépare le set, ses assistants règlent la lumière… Généralement c’est le moment où j’attends dans ma loge, en grignotant quelques douceurs, mais pas trop : il va falloir entrer dans la robe !
Ensuite, à moi d’entrer en scène pour le shooting. Comme tu l’as sûrement déjà remarqué, j’ai un sens assez inné du mannequinat. Je n’ai généralement pas trop de difficultés à trouver les poses naturelles, vivantes et élégantes qui mettront le vêtement en valeur au mieux. Je ne sais pas combien de fois j’ai été sollicitée par Vogue US pour faire leur couv’ après la parution d’un article [soupir las].
Une fois le shooting terminé, au tour des graphistes d’entrer en scène ! Recadrage, retouches lumière, matching des photos avec le texte… Tout cela pour arriver à l’article fini, celui que tu auras plaisir à lire, celui qui paraît si naturel qu’on a l’impression qu’il n’a demandé aucun effort.
Pour cette robe en particulier, je suis particulièrement heureuse du résultat : toute la Team Marjo a super bien bossé. Sous mes indications pointues, naturellement. J’adore porter cette robe au seyant nickel, tout en restant confortable. Son coton léger en fait une excellente compagne des jours de chaleur, et son imprimé pas exactement discret ne manque pas d’attirer l’attention.
Voilà ! J’espère que cette petite plongée exclusive dans « l’envers du décor » t’aura plu. Tu comprends un peu mieux désormais pourquoi je ne publie pas un article par jour, ni même un par semaine : c’est tellement de travail, tout ça !
Pour y parvenir, il faut être à plusieurs !
… Et moi, c’est mon cas : on est clairement à plusieurs, dans ma tête…
Je te laisse avec l’une de ces poses naturelles, vivantes et élégantes dont j’ai le secret. Je sens que le coup de fil de Vogue ne va pas tarder !