
Le prochain James Bond de cinéma sera une femme, et j’ai appris par les médias que ce ne serait pas moi.

Je suis déçue, évidemment. J’avais passé le premier confinement à entretenir cette condition physique exceptionnelle qui m’aurait permis, malgré mes 23 ans bien sonnés, d’assurer le job avec brio.

J’étais tellement prête, j’avais tellement bossé. Je m’étais conditionnée avec rigueur. Ci-dessous, l’exemple d’une journée de préparation.
08h : je me réveille dans les bras d’un quelconque homme-objet séduit la veille. A la table du petit déj’, mon mec fait la gueule. Je l’ignore et je file faire ma séance de tractions (à la tringle des rideaux du salon). Je me réhydrate après la séance avec une petite vodka-martini.
10h : je regarde ma montre pour vérifier si j’ai reçu un e-mail codé du MI6 m’informant de la localisation d’un dangereux cyber-terroriste vendeur d’armes nucléaires. Bon, ma montre est une Swatch de 2016. Du coup, j’ai juste l’heure. C’est la pause : vodka-martini.

11h : c’est l’heure de mon entraînement à la course-poursuite en voiture de luxe. Comme je n’ai pas encore reçu l’Aston Martin, je saute dans ma Twingo. Une vodka-martini pour la route, et j’attends que le facteur passe sur son vélo électrique pour lui coller au train.
12h : sur le chemin du retour, je m’arrête au bar-tabac PMU, pour une vodka-martini au shaker, pas à la cuillère. Le patron a mal compris. Tant pis, je siffle le Picon-bière.

14h : entraînement aux sports de combat. Mon mec refuse de jouer les sparring-partners. J’essaie d’apprendre une prise de krav maga à ma fille. Elle me colle un Playmobil dans l’œil, je m’écroule terrassée. Je note : tactique intéressante à suggérer aux producteurs du prochain film. Je bois une vodka-vodka pour calmer la douleur (plus de martini).
17h : atelier gadgets. J’avance bien sur mon prototype de presse-purée qui lance des fléchettes au curare, je suis contente. Je n’ai plus de vodka pour fêter ça, du coup je me sers un verre de vinaigre blanc.
20h : trou noir.
04h : je me réveille dans mon plumard avec un nouvel homme-objet. Mon mec fait la gueule – encore. Dur de vivre avec quelqu’un qui ne soutient pas mes choix de carrière.

Voilà, toute cette abnégation pour rien. En plus, je m’étais attaqué au dressing de James. J’avais cousu cette chemise de smoking. A porter naturellement sous un costard Savile Row, pour aller flamber 12 millions dans une partie de poker à Gstaad.
C’est un patron indépendant à nouveau, cette fois le modèle Annabel par Anna Rose Patterns. J’ai aimé sa ligne féminine, sa simplicité relevée par le petit plissé du plastron. J’ai choisi de la faire dans un piqué de coton offert par ma maman, afin de jouer sur le contraste des lignes.

Je l’ai masculinisée façon James en augmentant la taille du col officier (passée à 5cm) pour un effet vraiment haut et droit, et en choisissant des boutons noirs pour l’effet smoking. J’aime particulièrement le bouton à facettes du col, purement décoratif car pas destiné à être fermé – je vais te dire, je n’ai même pas ouvert la boutonnière.

Celles qui me lisent de longue date (et je les en remercie) se souviendront peut-être que ma préparation mentale à devenir James Bond date d’un moment. En 2013, j’avais déjà cousu une première chemise de smoking (un patron Burda) – déjà dans un piqué identique (… oui, les cheveux, je sais, vieillir c’est bien).

Problème, j’avais bousillé le col avec des traces de fond de teint – un problème que n’a pas dû rencontrer souvent Daniel Craig. Aujourd’hui, et grâce soit rendue à l’aloe vera pour ses bienfaits miraculeux sur les peaux à problèmes, je me maquille nettement moins. Celle-ci devrait donc durer plus longtemps. Et il me reste assez de piqué de coton pour m’en coudre une autre – on n’a jamais trop de chemises de smoking.
Par contre, si je dois recoudre ce patron, je raccourcirais les manches, trop longues sur moi. J’envisage même de les raccourcir sur cette version, c’est-à-dire démonter mes poignets impeccablement montés et refaire ma fente indéchirable réussie… HAHAHA ! Je déconne, évidemment. Ca va rester comme ça.

En vrai, la seule fois de ma vie où j’ai bu de la vodka-martini, c’était avec ma copine Blandine à Marseille en 2006. Voici une leçon de vie importante que je tiens à partager : quand tu commences à voir double et qu’il est déjà 5h du matin, ce n’est pas une bonne idée de t’attaquer à la vodka-martini. Je me souviens avoir vomi dans trois endroits différents de Marseille le lendemain.

Dans le prochain article, on revient à la maison-mère (Burda) pour un manteau qui devrait m’ouvrir une voie royale pour reprendre le rôle du commissaire Maigret – on croise les doigts !
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