
Comme le dit le proverbe : quand la vie te donne des citrons, fais de la citronnade ou une chemisette hawaïenne.

A l’origine, rien ne me prédestinait à coudre une chemisette hawaïenne à citrons en plein mois de mars (ni à aucun autre mois). Mais j’ai voulu apporter ma contribution au hashtag #endoyellowtouch sur Instagram. Créé par plusieurs couturières, ce mot-dièse (quand on cause bien comme à l’Académie Française) a pour objectif de sensibiliser à l’endométriose, une saloperie de maladie gynécologique qui provoque des douleurs fortes, voire invalidantes (notamment pendant les règles) et peut engendrer de l’infertilité. Et qui concerne UNE FEMME SUR DIX, juste.

Si les règles douloureuses étaient un problème de bonhomme, vous pouvez être sûres que ce serait réglé depuis 1886. Mais à la place, il a fallu que des générations de nanas s’entendent dire qu’elles étaient un peu doudouilles, que c’est normal d’avoir mal pendant les règles et qu’il y a quand même des causes un peu plus importantes que vos bobos de gonzesses !!… Donc laissez-nous finir d’élaborer le Viagra tranquilles et on reviendra vers vous par la suite. Bien cordialement.

Comme pour toutes les causes féminines/-nistes, il faut généralement rabâcher sur le sujet avant que Qui-De-Droit (politiques, scientifiques, médecins) réalise qu’il est temps de se remuer les miches. Donc, coudre du jaune ne va évidemment soulager la douleur de personne, mais donner de l’ampleur à un mouvement global pourra aider à une prise de conscience.

Habituellement, je me tiens à l’écart des mouvements couturesques un peu trop grégaires à mon goût de lonesome cowgirl qui coud son p’tit Burda dans son p’tit coin. Concours divers, défis collectifs, couture en masse du dernier patron indé, portée aux nues de la dernière viscose imprimée de chez Machin Chose au coût dérisoire d’un rein et demi du mètre (pour évidemment coudre le dernier patron indé)… J’ai toujours eu cette petite tendance à jouer toute seule dans la cour de récré.
Mais cette fois, après avoir constaté avec désarroi que mon stock de tissu ne comprenait rien de jaune, je me suis bien évidemment précipitée dans le Mondial Tissus le plus proche pour y remédier. Il faut savoir se sacrifier pour les causes fortes (violons).

J’ai arrêté très vite mon choix sur cette popeline à petits citrons, plutôt éloignée de ce que je coud habituellement. Et mon inspiration, dès que je l’ai vue, a immédiatement été celle-ci :
Vous trouvez ça bizarre ? Vous pouvez. Avoir envie de s’habiller comme un moustachu à grosse montre et torse velu (mais sexy à sa façon eighties) a de quoi dérouter. Tant pis, j’ai laissé libre cours à cette fantaisie, et c’était parti pour la chemise façon « Nos dernières vacances en club all inclusive à Saint-Domingue sur Oise ».

Au pire, si cela se révélait moche, une fois coupées les pièces, il me restait assez de tissu pour faire un petit short et recycler le tout en pyjama…
Le patron retenu s’est imposé assez vite, le chemisier #116 du Burda d’avril 2012 cochait toutes les cases : coupe droite, manches courtes, pas de pinces et surtout le col tailleur, incontournable grammaire de la chemise hawaïenne d’inspiration années 80. Parfaite pour boire des drinks élaborés avec dextérité par Tom Cruise au bar-paillote de la plage.
Aruba, Jamaïca, oooh I wanna take you / To Bermuda, Bahama, come on pretty mama… (le reste ici)

Ha, parce que oui, autre grosse référence :

Car oui, malgré mes 25 ans, j’ai une bonne connaissance des années 80.

Modifications apportées : suppression de la pince du milieu dos que j’ai remis au pli, pour une forme biiiien droite comme je les aime (boxy, comme on ne dit pas à l’Académie Française). Longueur rallongée (je ne sais plus de combien, 12 ou 15 cm je crois) . Manches également rallongées d’une dizaine de centimètres pour pouvoir les retrousser (paradoxe, quand tu nous tiens) au moyen d’une petite patte de boutonnage.


J’ai un peu sué sur le col tailleur. J’en avais fait un sans difficultés pour mon manteau napoléonien mais je trouve ça plus simple quand il y a une doublure, et donc une parementure de l’encolure dos, ce qui n’est pas le cas ici. J’en suis venue à bout, mais pas en suivant les explications de Burda, particulièrement brèves et absconses pour ce modèle.

En prenant le tissu, je n’avais pas pensé à racheter de l’entoilage au bon grammage. Je n’en avais que du noir sous la main, ou du blanc franchement plus costaud. Mais vu la transparence du tissu, l’entoilage noir était inenvisageable… Je redoutais l’effet « col en carton » mais je n’ai eu d’autre choix que de me contenter de mon entoilage trop fort. Les merceries sont fermées, car il semblerait qu’elles ne fassent pas partie des commerces prioritaires. Peuh ! On voit bien que Christophe Castaner n’a jamais eu à racheter en urgence de la Vlieseline H410.
Mais bon, ça passe. Au final, je peux même porter le col relevé, ce que j’aime encore mieux.

Le résultat me plaît grave, et je suis désormais tellement décomplexée de la chemise hawaïenne que j’en ai une deuxième découpée… Et l’imprimé citron vous paraîtra bien sobre quand vous aurez vu celle-là !
Bonne semaine, portez vous bien et restez chez vous !

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